Dark kitchens à Bordeaux : aux Chartrons, les riverains attaquent en justice contre les nuisances

Les cuisines fantômes continuent de susciter la controverse à Bordeaux.

Cette fois, c’est dans le quartier des Chartrons que les riverains s’élèvent contre les nuisances causées par ces restaurants sans salle, entièrement dédiés à la livraison.

En ligne de mire, Taster, une entreprise spécialisée dans ces cuisines virtuelles, dont l’activité engendre des nuisances sonores et olfactives. Un constat d’huissier est en cours pour appuyer une future action en justice.

Depuis plusieurs mois, les habitants des Chartrons constatent une détérioration de leur cadre de vie. Ils dénoncent les nuisances sonores causées par le ballet incessant des livreurs à scooter et à vélo, parfois jusque tard dans la nuit.

« C’est une agitation constante, surtout en soirée. On entend les moteurs, les conversations, parfois des altercations. Nos fenêtres donnent directement sur cette activité, c’est devenu insupportable », témoigne une riveraine qui vit à quelques mètres de la cuisine concernée.

Autre problème : les odeurs de friture et de cuisine qui s’échappent des installations.

« Ça imprègne tout. On ne peut plus ouvrir les fenêtres sans avoir l’impression d’être dans une cuisine industrielle », se plaint un autre habitant.

Un constat d’huissier avant la bataille judiciaire

Face à cette situation, plusieurs riverains ont décidé de prendre les choses en main. Ils ont mandaté un huissier pour constater les nuisances et établir des preuves en vue d’un recours en justice.

« On ne veut pas interdire les dark kitchens, mais il faut que leur implantation soit mieux encadrée. Aujourd’hui, elles s’installent sans concertation, au détriment des habitants », explique un membre du collectif qui s’est monté pour coordonner l’action en justice.

Ce n’est pas la première fois que des habitants de Bordeaux se mobilisent contre ces cuisines fantômes. À d’autres endroits de la ville, des plaintes similaires ont déjà été déposées, notamment contre l’entreprise Frichti.

Dark kitchens à Bordeaux : aux Chartrons, les riverains attaquent en justice contre les nuisances

Un phénomène en pleine expansion

Les dark kitchens se sont développées à grande vitesse ces dernières années, portées par l’essor des plateformes de livraison comme Uber Eats et Deliveroo. À Bordeaux, plusieurs enseignes ont vu le jour dans des locaux souvent discrets, installés en rez-de-chaussée d’immeubles ou dans des zones d’activités.

Mais leur multiplication pose question. Outre les nuisances pour les riverains, certains commerçants dénoncent une concurrence déloyale. Contrairement aux restaurants classiques, ces cuisines n’ont pas à supporter de coûts liés à une salle, à un service en salle ou à une mise aux normes d’accueil du public.

Une réponse encore timide des autorités

La mairie de Bordeaux, consciente du problème, a récemment durci le ton contre les dark kitchens et les dark stores (ces entrepôts dédiés aux livraisons ultra-rapides). Sandrine Jacotot, adjointe en charge du commerce, a indiqué que la municipalité surveillait de près l’évolution de ces nouvelles pratiques commerciales et réfléchissait à des mesures pour mieux les encadrer.

Au niveau national, un décret entré en vigueur en juillet 2023 a déjà apporté des clarifications en matière d’urbanisme. Les cuisines exclusivement dédiées à la livraison sont désormais classées comme des « activités du secteur tertiaire », ce qui permet aux mairies de mieux contrôler leur installation.

Vers un encadrement plus strict ?

La fronde des habitants des Chartrons pourrait-elle faire bouger les lignes ? En engageant une action en justice, ils espèrent obtenir des restrictions sur l’implantation et le fonctionnement des dark kitchens en milieu urbain.

« Aujourd’hui, il y a un vide juridique et une absence de concertation. Ce modèle économique ne peut pas se développer sans prendre en compte les nuisances qu’il génère. Il est temps que les pouvoirs publics s’en saisissent », martèle un des plaignants.

L’affaire pourrait créer un précédent et inciter d’autres villes à renforcer leur réglementation. En attendant, aux Chartrons, les habitants espèrent retrouver un peu de tranquillité.

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