La fraude aux compteurs électriques prend une ampleur préoccupante en France. Ce phénomène, mêlant techniciens avertis, réseaux clandestins et particuliers en quête d’économies, démontre les failles d’un système censé être infaillible.
En Gironde, un ancien employé d’Enedis est soupçonné d’avoir modifié illégalement des centaines de compteurs Linky, causant un préjudice estimé à plus d’un million d’euros. Comment un tel stratagème a-t-il pu perdurer ? Quels sont les enjeux cachés derrière ces manipulations ?
Depuis 2019, cet ancien technicien proposait à des particuliers de fausser leur consommation électrique. Pour une somme variant entre 200 et 400 euros, il modifiait leur compteur Linky afin d’alléger leurs factures d’électricité, une pratique aussi alléchante qu’illégale.
Loin d’être un cas isolé, cette affaire reflète un phénomène bien plus vaste. Enedis estime que plus de 100 000 compteurs Linky ont été trafiqués à travers le pays, représentant un manque à gagner colossal de 250 millions d’euros en 2022. Une réalité qui met en difficulté l’équilibre du réseau électrique.
Des précédents inquiétants
Les autorités ont déjà mis au jour plusieurs réseaux de fraude aux compteurs électriques ces dernières années. En septembre 2024, un homme a été arrêté après avoir modifié des centaines de compteurs Linky pour un prix similaire, exploitant les failles d’un dispositif pourtant présenté comme infalsifiable.
Modifier un compteur électrique ne relève pas d’un simple tour de passe-passe. Outre les risques techniques pour l’installation électrique, les contrevenants s’exposent à de lourdes sanctions : jusqu’à 3 ans de prison et 45 000 euros d’amende. Une sanction qui s’alourdit en cas d’association de malfaiteurs ou de fraude en bande organisée.
Un enrichissement conséquent
L’enquête a mis en exergue l’ampleur des profits générés par cette fraude. Les autorités ont saisi 72 000 euros directement sur les comptes bancaires du mis en cause, mais aussi un patrimoine conséquent comprenant une luxueuse BMW, une maison cossue à Saint-Aubin-de-Médoc estimée à 730 000 euros, ainsi qu’un appartement à Argelès d’une valeur de 90 000 euros. À cette liste s’ajoute un camping-car évalué à 60 000 euros. Autant de biens qui attestent d’un enrichissement fulgurant, fruit d’un trafic minutieusement orchestré sur plusieurs années.
L’affaire, prise en charge par la brigade financière et les enquêteurs spécialisés en fraude aux biens publics, aboutira devant le tribunal correctionnel de Bordeaux le 15 mai prochain. Les investigations ont été menées sous la supervision du parquet de Bordeaux, qui a coordonné les perquisitions et l’analyse des flux financiers suspects.
Face à cette recrudescence de fraudes, Enedis a renforcé ses contrôles et prévoit de multiplier les inspections dans les mois à venir. Des technologies avancées sont désormais utilisées pour repérer les anomalies, et les équipes d’enquêteurs spécialisés se déploient à travers le territoire.