Vendanges de la honte : à Bordeaux, un réseau de traite humaine jugé pour l’exploitation de 28 ouvriers marocains"

Depuis mardi 25 mars, une audience hors norme se tient au tribunal correctionnel de Bordeaux, où six individus sont jugés pour avoir orchestré ce que la justice qualifie de véritable réseau de traite d’êtres humains.

La Reine des Reynettes

Derrière les bancs des prévenus, deux Français et quatre Marocains, accusés d’avoir exploité vingt-huit ouvriers venus du Maroc. Ces derniers, attirés par la promesse d’un emploi dans les vignes bordelaises, auraient en réalité été piégés dans un engrenage de labeur abusif et de conditions de vie indignes, relégués dans des logements précaires au cœur du Lot-et-Garonne.

Ces hommes, tous originaires de la même région au Maroc, avaient été recrutés pour des missions saisonnières dans des exploitations viticoles girondines. À leur arrivée, ils ont découvert une réalité bien différente de celle qu’on leur avait promise. Selon les premiers éléments du dossier, ils travaillaient parfois plus de dix heures par jour, sans contrat régulier, pour une paie dérisoire – quand elle n’était pas tout bonnement inexistante.

Mais c’est surtout sur leurs conditions de logement que les enquêteurs se sont arrêtés. Les ouvriers étaient entassés dans des mobile-homes délabrés ou des logements précaires dans le Lot-et-Garonne, sans eau chaude ni sanitaires dignes de ce nom. Certains témoignent d’un sentiment d’enfermement, d’humiliations quotidiennes et d’une peur permanente de perdre leur unique source de revenus.

Les prévenus sont soupçonnés d’avoir mis en place un système bien rodé : les deux Français, patrons d’entreprises agricoles, auraient fait appel à leurs complices marocains pour faire venir la main-d’œuvre à bas coût, sans respecter les règles encadrant le travail saisonnier étranger. Une exploitation facilitée, selon l’accusation, par la vulnérabilité sociale et administrative des travailleurs, dépendants de leurs employeurs pour le logement, la nourriture et les papiers.

L’affaire s’inscrit dans une série de dossiers similaires qui commencent à émerger en France, révélant une face sombre de l’agriculture intensive. Il y a quelques semaines, un autre procès devait s’ouvrir à Châlons-en-Champagne autour de l’exploitation de 57 vendangeurs étrangers, logés eux aussi dans des conditions déplorables. Ce dossier a été renvoyé à une date ultérieure, mais les similitudes sont frappantes.

Du côté des parties civiles, les attentes sont fortes. Les associations, elles, espèrent un jugement exemplaire qui marquerait un tournant dans la lutte contre ce type de criminalité.

Le procès doit se poursuivre toute la semaine. La décision du tribunal est attendue dans les prochains jours. Elle pourrait, à bien des égards, faire jurisprudence.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

La Reine des Reynettes
Publicité
Bulletin Bordelais ®
error: