Un bourdonnement sourd et continu s’échappe d’un hangar abandonné aux Bassins à flot, à Bordeaux. Dans la nuit, une marée humaine s’y engouffre, attirée par une rave party clandestine dont l’emplacement n’a été révélé qu’au dernier moment sur les réseaux sociaux.
L’événement, qui a débuté dans la nuit du vendredi 31 janvier au samedi 1ᵉʳ février 2025, a rassemblé entre 300 et 500 participants. Installés dans un ancien entrepôt situé entre le boulevard Alfred-Daney et le cours Dupré-Saint-Maur, les teufeurs occupent le lieu sans autorisation, en accord avec l’esprit des « free parties » qui prônent l’autogestion et la liberté festive.
« Ici, pas de jugements, juste la fête »
Les jeunes présents se relaient pour expliquer l’essence de ce rassemblement.
« C’est une bulle hors du monde », raconte Théo, 22 ans, venu de Périgueux.
« Ici, on ne se connaît pas forcément, mais on est tous sur la même longueur d’onde. On vient danser, s’oublier le temps d’un week-end. »
Clara, 19 ans, originaire d’Arcachon, renchérit :
« On sait bien que ce n’est pas légal, mais c’est ça aussi, la free party. C’est de la musique, du partage, une communauté. On s’entraide, il y a une vraie solidarité ici. »
Dans l’immense hangar, une sono artisanale crache un son électronique puissant. Des lasers découpent la pénombre, tandis que des dizaines de danseurs se laissent emporter par les basses hypnotiques. Quelques bénévoles s’affairent à sécuriser l’événement : ravitaillement en eau, gestion des premiers secours et sensibilisation aux risques liés aux substances consommées.
Une tolérance sous surveillance
Si cette occupation est illégale, les forces de l’ordre se contentent pour l’instant de patrouiller autour du site sans procéder à une évacuation immédiate. « On surveille la situation », confie une source policière. « Tant qu’il n’y a pas de débordements ou de plaintes majeures, nous évitons d’intervenir brutalement. »
Un équilibre fragile qui permet à la fête de se poursuivre, au moins jusqu’au lundi 3 février, date à laquelle les organisateurs prévoient de démonter leur matériel et de quitter les lieux.
Ce type d’événement n’est pas une première à Bordeaux. Les Bassins à flot, ancien quartier portuaire en pleine mutation, attirent régulièrement des rassemblements alternatifs. Si certains dénoncent les nuisances sonores et les risques liés à ces fêtes sauvages, d’autres y voient une forme de résistance culturelle.
« Le monde devient de plus en plus aseptisé », estime Lucas, 25 ans, habitué des raves clandestines.
« On nous impose des cadres stricts partout. Ici, on retrouve un peu d’espace, un peu de liberté. »