La Gironde, avec ses paysages idylliques et sa croissance économique, cache une réalité sociale préoccupante.
Si le département figure parmi les plus dynamiques de France, il n’échappe pas à la montée des inégalités et à une précarité qui touche un nombre croissant de ses habitants.
Selon les dernières données de l’Insee, 14,5 % des Girondins, soit environ 220 000 personnes, vivent sous le seuil de pauvreté, fixé à 1 102 € par mois pour une personne seule en 2023. Ce chiffre, légèrement inférieur à la moyenne nationale (14,8 %), révèle néanmoins des disparités importantes.
Les familles monoparentales sont particulièrement affectées : 35 % d’entre elles vivent en situation de pauvreté en Gironde. Cette proportion grimpe à 40 % dans certains quartiers prioritaires de Bordeaux Métropole, où le taux de chômage atteint 19 %, contre 7,6 % pour l’ensemble du département.
Précarité de l’emploi et vulnérabilité des jeunes
Le marché de l’emploi girondin, bien que dynamique, n’est pas sans faille. Le taux de chômage, stable autour de 7,6 %, masque une précarité grandissante : 18 % des contrats de travail dans le département sont à durée déterminée ou à temps partiel subi. Les jeunes actifs, particulièrement exposés, affichent un taux de chômage de 18,3 %, bien supérieur à la moyenne départementale.
La précarité énergétique vient également aggraver la situation. D’après l’Observatoire régional de l’énergie, 12 % des ménages girondins déclarent avoir des difficultés à régler leurs factures d’énergie. Ces foyers consacrent parfois plus de 10 % de leurs revenus à se chauffer ou s’éclairer.
Malgré la présence de nombreux dispositifs, une partie des habitants passe encore sous les radars de l’accompagnement social. Le Secours Populaire de Gironde, par exemple, a recensé plus de 18 700 bénéficiaires d’aides alimentaires en 2024, un chiffre en hausse de 6 % par rapport à 2022.
Le RSA, quant à lui, est perçu par 56 000 personnes dans le département. Cependant, des associations dénoncent une sous-utilisation chronique des aides sociales : 1 personne éligible sur 3 ne fait pas valoir ses droits, souvent par méconnaissance ou par crainte de stigmatisation.
Les réponses locales : entre solidarité et innovation
Face à ces défis, le Département de la Gironde déploie une série d’initiatives pour réduire les inégalités. Parmi elles, la récente Stratégie Départementale de Prendre Soin, adoptée en 2022, met l’accent sur l’inclusion sociale et le soutien aux publics vulnérables. L’ambition affichée : réduire de 20 % le taux de pauvreté d’ici 2030.
Des dispositifs tels que la Mutuelle Girondine, en cours de lancement pour offrir une complémentaire santé accessible, ou les programmes d’insertion professionnelle comme les « chantiers solidaires », témoignent de cet engagement.
Les associations, de leur côté, jouent un rôle crucial. Outre le Secours Populaire, des organisations comme la Banque Alimentaire ou la Croix-Rouge interviennent pour répondre à l’urgence alimentaire et matérielle. La Banque Alimentaire a distribué plus de 5 500 tonnes de denrées en Gironde en 2023, aidant ainsi 63 000 bénéficiaires réguliers.
Malgré ces efforts, les inégalités persistent, exacerbées par la hausse des coûts de l’énergie et de l’alimentation. Selon une étude de l’Observatoire Girondin des Pauvretés, 45 % des familles monoparentales du département réduisent leurs dépenses alimentaires pour équilibrer leur budget.
Pour lutter efficacement contre la précarité, les acteurs locaux s’accordent sur une nécessité : renforcer les politiques publiques, favoriser l’accès à l’emploi durable et intensifier la prévention de l’exclusion sociale. La Gironde, avec ses initiatives pionnières, pourrait devenir un modèle en matière de lutte contre les inégalités, mais la route reste encore longue.